Les centres de torture de la wilaya de Tlemcen cachent encore d’innombrables secrets et des vérités accablantes témoignant de la barbarie du colonialisme et ses méthodes de répression.
Aucun de ces actes inhumains n’a fait plier la détermination, l’endurance et l’attachement d’un peuple à recouvrer son indépendance et la souveraineté de son pays.
Faisant partie de la Wilaya V historique lors de la guerre de libération nationale, Tlemcen compte 93 centres de torture, réduits à 36 en raison des conditions naturelles. S’ajoutent neuf centres de détention et trois camps de concentration dans les communes de Tlemcen, Beni Bahdel, Ouled Mimoun, Souahlia, Ghazaouet, Remchi, Beni Boussaïd (Service du patrimoine historique et culturel de la direction de wilaya des moudjahidine).
L'administration coloniale utilisait les centres de détention pour interroger et torturer les Algériens. Ils étaient jetés dans les fosses et ensevelis. Parmi les méthodes de torture utilisées, la même source indique que les tortionnaires recouraient à la gégène pour exposer leurs victimes à des décharges électriques, leur faisaient ingurgiter l’eau savonneuse et versaient du sel sur leurs blessures.
Le village Beghouane, de la commune de Souahlia,
Il avait la triste réputation d’avoir abrité le centre de détention le plus sinistrement connu de Tlemcen. La soldatesque coloniale y pratiquait les méthodes de torture les plus barbares sur les moudjahidine, relate le professeur d’histoire et président de l’Assemblée communale de Souahlia, Bouhadjab Abdelbaki.
Dar El Adhab (la maison de la torture)
"Le village Beghouane occupait une position stratégique exploité comme lieu de surveillance", indique le professeur, ajoutant que tous ses habitants ont été regroupés au niveau de la place "Rahabi" et ont été contraints, le 7 juin 1956, de quitter le village.
Bouhadjab Abdelbaki précise que le village Beghouane occupait une position stratégique surplombant un certain nombre dedechras (bourgades), dont Draouche, Arkoub, Ouled Ali et Ouled Ziria.
"Dar Yaghmoracen", hauteurs de la cité Sidi Amar
Le professeur Bouhadjab relève que parmi les moyens utilisés dans la torture dans ces geôles, les tortionnaires dénudaient les femmes devant leurs époux ou leurs frères. Ce centre appelé "Dar El Adhab" (maison de la torture) a vu le passage de nombreux membres de l’ALN et leurs proches. L’épouse du défunt moudjahid Abdelhafid Azzouz et le moudjahid Hassaïne Aboubakr, ont subi les pires pratiques inhumaines. Certains ont perdu la vie dans ce lieu. D’autres transférés au centre de torture "Dar Yaghmoracen" sur les hauteurs de la cité Sidi Amar, un autre site tristement célèbre "un point noir et une source de honte pour un pays colonisateur qui se revendique être terre des libertés et des droits de l’Homme", souligne le professeur Bouhadjab.
De hauts lieux de torture, Le centre dit "Barrage"
Le centre de torture dit "Barrage", sis au barrage de Beni Bahdel, est l’autre centre de détention aux innombrables crimes. Le président de l’APC, Bachir Mohamed indique que plus de 200 Algériens ont été internés et torturés au sein de cette tranchée, dénommée alors "prison du barrage" où les soldats ensevelissaient les torturés sous le mur du barrage et les couvraient d’immondices jetées d'un trou creusé dans le haut du mur.
Des cachots pour être entassés; lâchaient des chiens.
Une autre construction était utilisée dans l’interrogatoire des moudjahidine, qui étaient enterrés vivants, ajoute le Président de l’APC de Beni Bahdel. Il a relevé l’existence de cachots dans lesquels des moudjahidine des villages de Khemis, Azaiel et Beni Snouss, voir d’autres wilayas, étaient entassés et où les tortionnaires lâchaient sur eux des chiens.
Centre de torture "le château", Sebdou
De son côté, le moudjahid et ancien condamné à mort, Yabedri Belabbes, se souvient. Il a été arrêté en février 1960, après avoir été blessé suite à l’explosion d’une bombe. Il était en compagnie des défuntes moudjahidate Khelif Kheira et Hadjila Fatima, la première avait perdu sa main et l’autre une jambe, ainsi que ses frères de combat Hadri et Belhadji Hocine. Ils ont été transférés au "Barrage" avec 250 autres personnes.
Centre de torture "Zenfour", Ouled Mimoun
Yabedri Belabbes garde encore en mémoire toutes les pratiques barbares qui lui ont été infligées et se souvient du chahid Bouziani Ahmed, mort étouffé sous la torture, de Latrache Mohamed, dont le corps gangréné et dévoré par les vers au sein même de ce centre, de Betti Abdelkader et Ould Djelloul, et bien d’autres moudjahidine internés originaires de Setif, Jijel, Tébessa et d’autres transférés au centre de torture "Zenfour", dans la commune d’Ouled Mimoun.
Le centre de torture "le château", dans la commune de Sebdou, se distinguait tristement par la cruauté des moyens de torture utilisés, selon le délégué de l’organisation des moudjahidine de la daïra de Sebdou, le moudjahid Benziane Abdelkader.
Ce témoin se souvient que parmi les torturés se trouvaient les moudjahidine Bendahmane Abdallah, Si Tayeb, Youbi Mohamed, Benmansour Kaddour, Moussa Okacha, Boufeldja et bien d’autres.
Il affirme que de nombreux fils de la ville de Sebdou sont morts sous la torture au sein de ce sinistre centre, dont Djelmoudi Abdeslam, Benmansour Kaddour, Chater Tahar, Chater Abdelkader, Bakhti Aïssa, Bakhti Menoueur, Bakhti Ali, Bakhti Abdallah, Benbouhafs Tahar, Benaïssa Boubekeurn, Bensaha Amar, Sassi Kaddour, Belmhidi Si Miloud, Abdouni Miloud. Trois autres chouhada du village Tefsra, dans la commune de Beni Snouss, y ont également laissé la vie, trois membres d’une même famille, à savoir Gouraï Boubekeur, Mohamed et Ahmed.
Ils restent des lieux de mémoire
Ces lieux ont besoin aujourd’hui de travaux de restauration et d’aménagement pour qu’ils restent des lieux de mémoire et des témoins pour les générations montantes sur les crimes abjects du colonisateur barbare.(Aps.dz, 31 octobre 2021, https://www.aps.dz/regions/129696-centres-de-torture-de-tlemcen-des-cachots-temoignent-de-la-laideur-du-colonialisme-francais).
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