dimanche 28 août 2022

Sidna youchaa, Sidna Noun et Barbadjani : Sites historiques des environnants de Nédroma, par l'anthropologue Réda BRIXI, Université de Montréal.


Voici le texte de la conférence donnée par un anthropologue de l'université de Montréal en 2003 à l'occasion de la 4 ème conférence sur l'histoire de Nedroma organisée au palais de la culture d'Alger.
 Les estivants sont intéressés par l'histoire de Sidna – Youchâa, 
ils n'arrivent pas à la situer dans l'enchevêtrement historique depuis les phéniciens en passant par les Romains, les Berbères, les arabes et les Turcs. La région côtière, fut soumise à une série d'occupation, de visite militaire stratégique et de poursuite. Mais ce qui frappe le plus, c'est cette emprunte du nom de Sidna Youchâa. Qui fut-il ?
Un éclairage situera la légende de l'histoire.
En plein centre du village, situe à  10 kilomètres de Nedroma, une mosquée abritant la tombe d'un saint personnage du nom juif de Youchâa ou Ya'chwa, celui de la Bible qui le traduit en « Josué ». il fut un  géant, dit la légende, un géant humain. (Sa tombe s'allongeait sur 10 mètres). La tombe fut réduite. Le lieu est sacré alors que les juifs des environs et d'autres pays le considère comme un important prophète (Nabi Youchâa).
Youchâa serait bien le successeur de Moïse
Pour la légende; C'est en  poursuivant Moise qu'il serait venu jusqu'ici. Cela se serait passé, il y a  37 siècles et 35 ans assurait-on en 1972. En tenant compte des divergences lunaires et solaires, cela remonterait à peu près vers la période de l'exode. 
Historiquement,  Josué n'est pas mort ni enterré à Sidna – Youchâa. « Josué, fils de Noun, serviteur de Dieu, meurt à l'âge de 120 ans, on l'ensevelit dans le domaine qu'il a reçu en partage à Tinnat – Serak dans la montagne d'Ephraïm, au Nord du Mont Gaash « (livre de Josué 24, 24). Il n'est pas non plus possible d'admettre que Sidi Noun  soit le père du célèbre Youchâa. 
Les hébreux émigraient jusqu'Agadir
Autour de Touggourt, dans les Aurès, à Tamentit dans le Touat ou à Taroudant dans la vallée du Souss, il eut des centre importants d'Hébreux. Certains l'expliquent par des migrations commerciales ou politiques, d'autres par la répression romaine après le  soulèvement juif qui ensanglanta la Cyrénaïque vers l'an 118 de notre ère.
Sidna – Youchâa fut un lieu de halte maritime 
au temps des Phéniciens et des Carthaginois, alors que les navigateurs tiraient leurs barques sur le sable, ne fut jamais un port. Il fut question vers 1835, d'en aménager un, l'idée en fut abandonnée car la mer y est souvent violente et la baie est un abri insuffisant.
Au bas du Djebel Mazil, dominant à l'Est la baie face au cap Tarsa, fut trouvé en mer, en 1933, un canon du VVII ième siècle.  Depuis une dizaine d'année, la mer a rejeté une immense ancré de quelques tonnes dont personne n'a située l'époque. Les estivants frequentent cette plage grouillante jouant un air de Raï, sans se soucier ni de l'origine du marabout et encore moins savoir  s'il est hébraïque ou musulman.
Barbadjani est la grotte miraculeuse
La plage de Barbadjani est connue aussi bien des Nedromis que des Tlemceniens. Site attirant et touristique où les estivants viennent se délasser, pêcher et piqueniquer. La plage s'étale sur cinq cent mètres à l'ombre d'une grande falaise abrupte. A l'Ouest, elle est surplomber par la blancheur d'une Koubba où niche Sidna Noun.
 En face une autre falaise à pic, comme coupé d'un coup de sabre. La mer s'insinue au milieu de ces trois falaises débouchant sur une plage en demi cercle. l'endroit est agrémenté d'une source d'eau douce. Cette grotte, très spacieuse, creusée dans la falaise, jouit d'une grande renommée. 
Grotte de la fécondité
Les stériles de la région s'y rendent pour demander la fécondité et la bénédiction divine. Le spectacle est saisissant à la vue des femmes, la taille ceinte d'un foulard multicolore munie de peignes gravissant la pente argileuse et glissante à l'intérieur de la grotte. Là, elle démêlent leurs cheveux, se fardent de koheul comme pour plaire à de malins génies, invoquent Dieu et Sidna Noun pour que leur chair enfante un fils. En sortant elles accrochent pieusement leur foulard en guise d'ex – voto, à une stalagmite. Elles attendent un moment qu'une goutte d'eau suintant de la voûte rocheuse tombe sur leur tête découverte. Ce rite magique une fois accompli, les résultats ne se font pas attendre parait-il !
Barbadjani, repaire des Corsaires ?  
Ce qu'El Bakri au XIième siècle appelait « Marsat er Ribat », connu sous le vocable de Marsa Arobat à partir à partir du XV ième siècle, elle servit un moment de cache ou de guet aux corsaires ; certains souvenirs y montrent les Frères barberousses abritant leurs felouques pour bondir à l'improviste sur les galéasses espagnoles. 
Au XIX ème siècle le coin eut un autre nom tout pacifique, celui de Cala Barbadjani, car un vieux pêcheur italien de Ghazaouet , Jean ou Jeani « Barba Jani » y abriter son bateau.
Le sultan noir des Mérinides 
 Les "Merinides" ( Abou Hassan appelé le Sultan noir venu de Fés)  avaient assiégé Tlemcen des "Zianides" et après sa victoire, il vint à Sidna Youchâa pour remercier le marabout. Il est possible qu' il soit venu en personne car il porta un grand intérêt au littoral, tant au point de vue militaire qu'au point de vue commercial. C'est à lui que l'on doit le beau minaret de la mosquée d'Honaïn dont le juriste tlemcénien saïd et Oqbani en fut le cadi. (Les derniers vestiges du minaret ne disparaîtront que vers 1930).  La voix traditionnelle attribue au sultan noir les tours de guet de plusieurs sites dont celui de Honaïn, de Taoount, de Mersa Arobat et de Dar Nador. (Réda Brixi, Muséologue, anthropologue).

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